Afin de développer une médecine de précision en psychiatrie, il est nécessaire de mieux comprendre le rôle et l’implication du système immunitaire chez les individus souffrant de troubles bipolaires ou d’autisme. Une équipe de la fondation française FondaMental vient de réaliser deux études pour comprendre l’origine des troubles immunitaires dans ces deux maladies psychiatriques. Zoom sur l’ensemble de ces travaux.
Des études précédentes montrant l’implication clef de l’immunité
De nombreuses études épidémiologiques ou des observations cliniques ont montré, ces dernières années, qu’un dysfonctionnement de la réponse immunitaire est retrouvé chez un grand nombre de personnes souffrant de troubles psychiatriques comme l’autisme, la schizophrénie, la dépression ou la bipolarité.
Dans ces travaux internationaux reliant psychiatrie et immunité, les chercheurs relèvent la présence, chez les patients atteints de troubles psychiatriques, de :
- Marqueurs de l’inflammation (cytokines, Protéine C réactive, etc.) ou d’auto-anticorps (anticorps dirigés contre l’organisme à protéger) dans le sang et le cerveau ;
- Anomalies de fonctionnement des cellules immunitaires ;
- Déséquilibre de la flore intestinale dans laquelle on retrouve des cellules du système immunitaire ;
- Pathologies auto-immunes (lupus, psoriasis, etc.) et inflammatoires.
Remonter aux origines des profils génétiques
Dans le prolongement de ces résultats, une équipe de la Fondation FondaMental s’est intéressée au système HLA (Human Leukocyte Antigens) dans l’autisme et les troubles bipolaires.
À savoir ! Le système HLA est un groupe de gènes distinguant les cellules du soi (cellules appartenant à l’organisme) et du non-soi (bactéries, virus, parasites, greffons…) chez l’Homme et impliqué dans l’activation du système immunitaire
Conduite auprès de 471 personnes autistes et 350 personnes en bonne santé, cette étude inédite montre que deux profils de système HLA sont rencontrés plus fréquemment chez les personnes autistes.
Ces deux profils sont connus pour être associés à :
- Des formes de maladies digestives comme la maladie cœliaque, qui ressemblent aux troubles digestifs associés à l’autisme ;
- La réponse inflammatoire et anti-infectieuse.
L’autre étude, menée auprès de 475 patients atteints de troubles bipolaires et 195 témoins avait pour ambition de comparer la distribution de deux grandes familles de gènes connus pour leur implication à reconnaître les agents pathogènes que sont les virus, les bactéries et parasites.
Globalement, les chercheurs ont mis en évidence des combinaisons de gènes associées à un plus grand risque de développer la forme grave de la maladie bipolaire qui est associée, par exemple, à des cycles rapides (plus de 4 épisodes par an) et à un risque aggravé de tendance suicidaire.
Une approche plus personnalisée des troubles bipolaires et des troubles du spectre autistique
» Ces deux publications sont très importantes, car elles consolident la piste de l’implication de désordres immuno-inflammatoires en psychiatrie et nous permettent d’avancer dans la recherche de biomarqueurs « souligne Marion Leboyer, directrice de la fondation FondaMental et responsable de l’étude sur la cohorte de patients atteints de troubles bipolaires.
Pour les chercheurs, ces indicateurs biologiques couplés à des observations cliniques permettront de :
- Mieux comprendre l’hétérogénéité des troubles bipolaires et de l’autisme ;
- Identifier des sous-groupes de patients pouvant bénéficier de thérapies anti-inflammatoires ;
- Caractériser les facteurs de risques environnementaux entraînant un dysfonctionnement du système immunitaire ;
- Améliorer le pronostic et les thérapies des individus atteints de bipolarité ou d’autisme.
Julie P., Journaliste scientifique
– Viser l’inflammation pour combattre les maladies psychiatriques. Les généralistes. CSMF. Consulté le 15 aout 2018.